Aujourd'hui, on a décidé de s'offrir une randonnée de 4h à la cascade Ñivinco. Au bout de seulement 15min de marche, le chemin est coupé par une rivière, donc pas le choix: on traverse ou on rebrousse chemin. On enlève les chaussures de marche, on retrousse le pantalon et on est partis. Mon dieu, l'eau est glacée et nous paralyse les os, heureusement que c'était une petite rivière! Le chemin continue, idyllique, entre bambous, dont la présence nous surprend, pins et arbres morts au tronc presque couleur argent tant il est blanchi par le temps. Les bambous sont étranges, ils poussent touffus, si bien qu'on dirait des conifères, on les renomme pimbous. Enfin on parvient à la cascade, superbe. Mais au vu des embruns glacés et des nuages capricieux, on n'utilisera pas les maillots. On trouve un passage pour se caler en plein en face de la cascade pour pique-niquer. Plus loin sur la berge, on voit un couple aux mollets mouillés, qui regarde vers nous comme en se demandant par où on est arrivés là. Maïa, grand coeur, leur indique avec des signes le chemin à prendre. A vrai dire, de loin ça ressemblait à une chorégraphie de majorette, car on ne vit jamais le couple monter de notre côté. Peut être n'avaient-ils pas envie de monter, ou peut-être aussi qu'ils ne prirent pas les indications de la jeune épileptique au sérieux. Il commence à faire frais donc on retourne à la voiture. Au total, 3h30 montre en main, pause déjeuner compris, on commence à se dire que les temps estimés de balade on été comptés à l'allure d'un vieux cul-de-jatte. En début d'après-midi donc, on se fait une petite séance plage sur le dernier lac à visiter, jeux de cartes futiles où on ne fait que perdre et shampoing dodo pour Maïa. L'équipe se divise ensuite, Maïa et moi de corvée ravitaillement à Villa Angostura, et les garçons montent le camp. Arrivés à la crique du premier jour, on l'avait bien aimée, elle est remplie, et oui c'est le week-end. On parvient à trouver un endroit au calme, idéal à priori, mais quand les tentes seront installées on comprendra par un fumet subtil qu'on s'est placé devant les toilettes naturelles du camping. En partant aux courses, on voit un pauvre homme qui sue en autostop, comme des dizaines sur la route des lacs, qui se résignent à marcher d'un endroit à l'autre sous la cagnard avec les bretelles du sacs qui leur cisaillent les épaules, alors on le fait monter. Fernando, curé, pédophile?-demandera Alex plus tard? Il n'a pas précisé. Il se balade en Argentine comme son cursus à Santiago est fini, et l'année prochaine il part en mission au Nigéria. Je repense à ma mère qui y a été plus tôt cette année et qui a ressenti une profonde tristesse en interrogeant d'une part ceux qui voulaient partir, plein d'illusions erronées ("on traverse la Méditerranée en un jour, c'est une rivière", "quand on arrive en Europe on nous accueille, on prend soin de nous"), et d'autre part, ceux qui en sont revenus et qui se sont confrontés aux nombreuses réalités de cette migration (certains se font racketter à chaque passage, n'arrivent jamais, sont emprisonnés, battus, d'autres se font violer, envoyer à se prostituer et nombreux sont ceux qui ont honte de dire à leur famille qui a tout investi ce qui s'est passé). Puis je pense à Fernando et sa mission, qui n'aidera pas à résoudre le problème de ces gens mais qui les aidera peut-être à surmonter un autre jour. "Ya du boulot là-bas" je finis par dire, simplement. On le dépose à la ville et on fait les emplettes, non sans s'octroyer une récompense de bonbons et gâteaux. Au retour, on voit quatre filles, d'environ 18 ans qui font du stop. On propose d'en prendre 2, qu'.elles se divisent en 2 groupes, car elles trouveront difficilement un véhicule qui puisse les prendre à 4. Elles paraissent étonnées mais acceptent, on leur dit qu'on va au camping gratuit, elles disent d'accord mais là encore elles semblent débarquer ces Argentines. C'est toujours rassurant de voir qu'on est pas les plus parvenus dans ce voyage. A notre retour au camping, tout est prêt, on a même des fleurs qui décorent nos tentes en prime! Autour de nous, on ne s'étonne plus de voir les gens sortir leur hâche de leur coffre, ça semble courant pour tout bon campeur... Devant nous il y a une famille de 15 qui sont venus en autobus avec un groupe électrogène qui tournera jusqu'à 23h et à côté de nous, un groupe de bikers qui écoutent du métal dégueulasse sur un crachoir, heu, une radio. Bon ben bonne nuit en pleine nature les amis!